Il fallait bien se réveiller un jour, cette douceur ne pouvait pas être éternelle.

Retour à la case départ. Les valises se défont petit à petit. Dans ma chambre règne une atmosphère propre et fraiche qui contraste avec celle de fourbis de ce matin aux aurores.
Le voyage du retour a été long. J'ai réalisé que je me rapprochais de Romain spacialement tout en m'éloignant de Lui et de ses yeux bleus temporellement.
La Toscane m'a encore ennivrée et le Sud m'a revitalisée sans que j'ai beaucoup dormi. Revitalisée jusqu'aux timides larmes versées à la fin dans ses bras.
Je ne sais par où commencer. Disons que la semaine la plus riche en évènement fut celle passée dans le Sud. Comme d'habitude, j'ai rencontré une quantité de gens. Plus que les autres années d'ailleurs.
Je n'arrive pas à mettre tout en ordre. Mais je vais essayer parce que j'ai envie de revivre avec quelques mots tout ce qui s'est passé. Essayer de refaire entrer dans mes yeux sous forme de poussières magiques leurs sourires immaculés.
Alors il faut remonter le temps. Oh pas trop, je n'ai pas envie d'échouer au temps des couches-culottes et biberons baveux. Seulement le remonter trois semaines auparavant.
Et voilà que nous sommes dimanche. Le ciel est très bleu, sans l'ombre d'un nuage, le soleil pique les yeux et l'eau de la piscine est bien fraîche. Je me suis levée tôt pour profiter de la luminosité matinale et je plonge tête la première dans l'eau chlorée. Je nage longtemps, une heure peut-être, je ne sais plus. Et puis Ils arrivent. Je ne connais pas encore leurs noms mais j'ai envie de savoir. Je les vois à contre-jour. Ils se ressemblent un peu, exactement le même genre de nez, assez grand, un peu fort. L'un est blond, les cheveux courts, il semble avoir une pêche d'enfer. L'autre est brun, les cheveux légèrement longs et bouclés et dès que je l'aperçois, je suis frappée par la douceur que dégage son allure générale. Plus tard, quand je le connaitrai, je verrais que ses cheveux, ses sourcils et même ses cils ne sont pas vraiment bruns mais comme voilés par une couleur blonde... c'est très spéciale à expliquer.
Par chance ils posent leurs serviettes dans l'herbe, à quelques centimètres de mon paréo. Je sors de l'eau rapidement manquant d'écraser mon nez contre un géant à la poitrine trop poilue pour être réellement humaine.
Je m'allonge. Le soleil tappe forte maintenant. Et sans que j'ai pu réfléchir à "je les aborde ou pas ?", le blond s'approche de moi, un grand sourire collé aux lèvres et me demande si ça me dérange qu'ils aient mis leurs serviettes juste à côté de la mienne. Je réponds en souriant, les yeux plissés parce qu'éblouis par le soleil, que vraiment non. Et puis s'en suit les présentations, c'est quoi ton prénom, Inès et toi, moi c'est Thomas. Ensuite le faux brun s'approche et je suis tout de suite frappée par le bleu éclatant de ses yeux. Vraiment, je n'ai jamais vu pareil couleur. Jamais. J'apprends deux secondes après que son prénom à lui c'est Romain, qu'il a 17 ans, que Thomas 18 et qu'ils sont cousins. Nous parlons tous les trois puis une brune à la voix suraigüe et sa copine, brune elle aussi, coupée à la Amélie Poulain viennent à notre rencontre.
Une heure après nous sommes tous les cinq autour d'une partie de cartes, se passant une bouteille de kronembourg tièdasse.
Je ne sais pas si c'est la toute petite dose d'alcool que j'ai bu mais j'ai l'impression que mon regard ne fait que se perdre dans les yeux de Romain.


Ce dimanche là, je ne savais pas que c'était le début. Le début d'une semaine sans dormir ou très peu, le début de son corps contre le mien, le début des plongeons de Thomas et de Lui sous les yeux ébahis de Charlotte, Cam' et moi, le début de JC qui lance la mode "amis du soir, BONSOIR !", le début de JB (non pas Jean Baptiste MAIS Jean Brice!) qui lorsqu'il est îvre hurle "viva Belgium" sans que personne ne lui réponde en retour.
Tant de gens. Tant de mots. Et tes yeux. Mince.
Je me souviens bien de Théo aussi. Théo qui me dit avec une belle étincelle dans les yeux qu'Inès c'est beau. Inès... hein les mecs que c'est beau ? Et là une dixaine de paire d'yeux se retournent vers moi et hochent la tête. Quelques oui fusent et Romain dont la main est derrière mes hanches, resserre son étreinte.

Tout cela... comment tourner la page, penser à autre chose ? Comment ?

Bibou, ma Bibou strasbourgeoise, me demande si Soleil est passé à la bad trappe. Oui. Soleil n'est plus qu'une éclipse.
Et bizarrement je m'enfous. Et je ne m'en veux même pas de m'enfoutre.

J'ai l'impression d'avoir un peu changé. Pas fondamentalement bien sûr mais un peu.

En Italie je n'ai fait que me languir de Romain. J'aurais voulu le sentir contre moi, pouvoir presser sa main chaude dans la mienne et goûter encore et encore à ses lèvres douces. Il me manque. Même son sourire me semble avoir été juste une illusion.
C'est comme à Florence lorsque je suis entrée dans un magasin. Dit comme cela, ça parait anodin mais enfait pas du tout car dans ce magasin, mes yeux ont failli sortir de leurs orbites. Je m'explique: devant moi se tenaient Tim Burton et Helena Bonham Carter. Rien que cela. Et ce n'était pas une illusion.

Le soir en m'endormant, je n'ai pas fait que me passer en boucle les instants vécus avec Romain, j'ai répété je ne sais combien de fois "j'ai vu TIM BURTON ! J'AI VU TIM BURTON ! Quand je pense qu'il connait Johnny Depp ! IL CONNAIT JOHNNY DEPP ! mon Dieuuuuuu". Puis j'ai sombré au pays des songes.

Cet article ne rime plus à rien. Au début je voulais tout raconter de ma semaine dans le Sud, mais c'est impossible. Tellement de bons moments, des moments simples mais si beaux. Je les écrirai, c'est sûr. Mais petit à petit, comme on défait sa valise.