"Tu disparais, ré-apparais, Putain faudrait savoir"

Quelques phrases dans un cahier à grands carreaux. Il passe rapidement sa main sur la feuille et l'ancre bave. Il me reproche tout un tas de trucs dont je n'ai jamais connu l'existence. Le violon sous le bras, il me quitte en plein milieu du passage clouté et me laisse seule sur un des rectangles blancs. La solitude me mange petit à petit jusqu'au moment où une grosse mercedes grisâtre me claxonne violemment. Je lui aurais cracher au capot. Mais je ne m’appelle pas madame la pluie.
Je lui ai couru après. Pas question de le laissé filer. J'ai crié qu'il fallait qu'on s'explique, que je lui collerai aux basques tant qu'il ne m'avait pas expliquée ce qui n'allait pas parce que visibement quelque chose ne tournait pas rond...
Alors il s'est assis sur un banc de pierre qui a semblé surgir de nulle part. Il a commencé à pleurer et les gens autour de moi m'ont regarder méchamment comme si je devais avoir honte d'être assise à côté d'un joli garçon en larmes et de ne rien faire. Mais que faire ? J'en ai ma claque de les consoler, tous. TOUS. On me console moi ? Non, je frappe mon poing contre le mur blanc cassé et je crie parce que je me suis fait horriblement mal. Je me sens ridicule, je perds mes moyens devant moi-même et mon coeur s'ensanglante. Mais personne n'est là pour me presser le bras gentimment, pour me dire que "ça va aller", que je suis une personne formi-formidaaaable et autres stupidités qui remontent le morale.
Alors j'ai rien dit, j'ai attendu bien sagement qu'il tout ce qu'il avait à dire.
J'ai regardé ses mains comme je l'avais fait la première fois. Elles semblaient mortes et complétement différentes de celles si fabuleuses d'autrefois.
Luc semblait différent. J'ai cru pendant plusieurs mois qu'il était génial. Puis j'ai pensé qu'il était con. Et me voilà à ne plus savoir.
Il est amoureux de moi. Ouais bon hein. J'ai rien fait. Il est amoureux d'une petite adolescente de pacotille. Je les comprends pas tous ces mecs, ils n'ont pas de cerveaux ?

Avant je pensais qu’ils étaient merveilleux. Maintenant je doute de leur suprême intelligence. La roue tourne. Nos sentiments aussi.

Apparemment pas les leurs.

Mais qu’ils plongent tous, la tête la première, dans la poubelle à déchets dit banals. Les peaux de bananes, les emballages de yahourt, tous ceux-là. Allez vous faire voir, je fais grêve et je pense aux Autres.

Alors j’ai profité. J’ai fait de la pâte à crêpe. J. m’a dédicacée le bras, il paraît qu’il vaut beaucoup d’argent maintenant. J’ai battu L. au bras de fer. Tous les mecs ont été soufflés. Pour voir, j’en ai fait un avec quelques autres jusqu’à Nico qui m’a écrasée lamentablement. Nico. Mince. Quand je le vois ça me fait encore un pincement au coeur. Bibou dit que c’est normale. Mais je me sens tellement coupable. Tout aurait été mieux si mes pitoyables sentiments n’étaient pas apparus. Mais c’est ainsi, le premier jour que je l’ai vu, je suis tombée amoureuse. Ses yeux bleus ( encore ! ), ses cheveux dorés, son visages un peu cassé, un peu genre champion de boxe.
Puis les Vosges et le soleil qui pique. La rivière gelée mais on a tellement chaud qu’on y entre d’un coups. Puis les appels de deux heures pendant la nuit. Ensuite plus rien.
C’est si loin.

Mais la roue tourne.

“Dis est-ce que tu m’aimes encore ?”