Comme les jours, les gens passent, on les aime et puis on les oublie. De l'autre côté de la rue, Fred marche, des écouteurs dans les oreilles. Étonnée, je me dépêche de changer de trottoire pour le rencontrer, par hazard...
Ses yeux se posent sur moi mais il ne me reconnait pas tout de suite. Quelques secondes à me détailler et là il dit tout haut, d'un ton joviale :
" Heyyyyyy ! "
Puis on se fait la bise, sagement, un " comment tu vas ? " s'échappe en coeur de nos bouches souriantes et on reste planté au milieu de la rue à bavarder. Finalement on finit dans un café, à discuter. Mince. Dire qu'il a neuf ans de plus que moi. Mince, dire que je suis enface du plus mûr et âgé de tous ceux dont je me suis un jour éprise. J'ai été folle. Je suis folle de parler avec tant de naturel, sans me soucier de ce que j'ai pu faire avant. Ou que je n'ai pas fait.
Mais toujours est-il que la café au lait est bon. Très sucré, très comme il faut. Et que ses yeux chocolats sont beaux.
Il refait un remplacement à France Bleu. J'espère qu'il ne connaitra pas une autre stagiaire que moi. Qu'il ne lui passera pas autant de fois qu'elle voudra Roxanne de Police.
Oh cette chanson...
En attendant il me parle et me sourit, alors j'en profite. Je bois chacune de ses paroles rafraichissantes. Ca fait un terrible contraste avec le liquide chaud que je sirote en parallèle. Mais c'est agréable.
J'ai dû partir, rentrer chez moi pour bosser. Ma mère s'inquiétait.

" pourquoi t'as mis autant de temps ? "

... parce que j'ai croisé au détour d'une rue un copain que j'avais, comme qui dirait, perdu de vue...