©Ninoutita


Tu les verras ventripotents, agacé par les mouches et suant dans la moiteur d'un début de mois d'août. Voilà les nouveaux séducteurs, le tiers vulgaire et le reste dégeulasse, ils viennent t'aborder comme ils achètent de la viande : je veux ce bout-là, il semble frais et agréable sous la dent. Ce n'est plus qu'une question de chair de toute manière, on vire les sentiments et on s'attache à avoir une apparence appétissante. Ce n'est plus une recherche de la beauté pour éventuellement séduire, c'est la recherche de la séduction par la beauté. Je ne veux pas rentrer dans ce jeu-là, je veux du gentleman fragile pas un gros porc à l'haleine alcoolisé.
Même si j'ai l'air désagréable, je m'en contrefous, je préfère rester seule plutôt que de me faire choisir. Parce qu'aujourd'hui, c'est comme une élection : celle-ci ? Celle-là ? Mais ça devient dangereux quand les sexes se valent et qu'on entend des "celui-ci ? celui-là ?".

Mon article est inspiré par deux évènements. Le premier est une soirée passée dans une boîte avec Monk, à se faire aborder par des garçons sans intérêts et dépourvus d'un tout petit peu de subtilité. Je vois encore leurs regards vides, il n'y a pas une lueur d'intelligence dans ces yeux-là. L'alcool pourra être un prétexte, il ne me semble pas que mes amours ou même mes amis aient eu un jour l'oeil aussi vitreux et stupide.
Le deuxième est une émission sur l'émancipation des femmes dans les années soixante-dix en Europe. Je vous assure que c'est troublant de voir Amanda Lear chanter "follow me" avec une voix troublante et androgyne -quoique plus près de celle d'un homme. Les féministes s'en sont pris plein la gueule, comme si être l'une d'entre elles se réduisait à ne pas s'épiler les aisselles, ne pas porter de soutien-gorge et coucher avec des femmes. Quelle image ! Dans ce documentaire, on voyait un moment les manifestations pour l'avortement. Une vieille était interviewée et criait "VOUS N'AVEZ QU'À PAS BAISER !" puis un "et toc" insupportable sortait de sa bouche. Une femme lui répondait "vous ne baisiez pas vous ?". Elle n'a pas su quoi répondre. Et toc.
Une féministe connue allemande dont j'ai oublié le nom s'est fait énormément lynché dans la presse à cette époque. Elle avait un discours intéressant quant à toutes les diffamations qu'elle subissait : il lui semblait qu'attaquer une personne est toujours plus aisé qu'attaquer un mouvement. Je crois qu'elle a entièrement raison.
En Italie, Adriano Celentano continuait à promouvoir une image désuète de la femme au foyer, dévouée corps et âme à son mari pendant que les femmes et pas mal d'hommes se battaient pour garder le droit de divorcer.

Aujourd'hui, la femme a le droit de divorcer, d'avorter, d'avoir son propre carnet de chèques et de travailler. Ainsi elle a la capacité de ne plus dépendre de son mari. Tout cela grâce à ces femmes qui ont accepté que le monde -aussi bien les femmes que les hommes- ait une mauvaise image d'elles. Au travail, l'égalité n'est pas encore vraiment présente mais les choses changent.
Mais voilà, je crois qu'il y a quand même un problème. Quand on voit tout le travail qui a été fait pour la femme, je me demande (et je suis loin d'être la seule) pourquoi des certaines continuent à se dévaloriser. Quand j'étais à Florence, le soir où je suis sortie avec les deux allemands, il y avait plusieurs jeunes, très jeunes filles sur la piste de danse dans des mini-short, décolletés et nombrils à l'air entrain d'effectuer des lap dance dignes de streap-tiseuses sur des poteaux surélevés. Elles devaient avoir environ quatorze ou quinze ans et des hommes entre vingt et cinquante ans se rinçaient l'oeil. Kiss s'est gondolé, moi je n'ai pas ri, en fait je crois bien que j'étais assez choquée.
Est-ce que ce sont les clips de musique pourrie qu'il leur donne cette image de la femme sexy ? C'est vrai que la télévision, encore plus en Italie d'ailleurs, leur vend une image dégradante d'elle-même mais il faut quand même être sacrément influençable pour se laisser prendre par cette vulgarité.
Enfin hier après ce reportage, j'étais déçue. Ca m'a fait le même effet que mai 68. Bien sûr, des choses énormes ont changé mais d'autres choses se sont empirées. Cette société basée uniquement sur l'apparence me donne envie de partir dans les rizières célestes du Vietnam. Pourtant j'aime la mode et Glamour. Mais peut-être la différence se trouve dans l'acte de ne pas vouloir suivre le régime de l'été qui permet de perdre trois kilos en une nuit et demi en mangeant une carotte cueillie à Tchernobyl. Peut-être...