" Raphaël à l'air d'un ange, mais c'est un diable de l'amour
Du bout des hanches et de son regard de velours,
Quand il se penche, quand il se penche, mes nuits sont blanches,
Et pour toujours..."
Carla Bruni

Avant, pour moi, il n'était qu'un ami, parmis tant d'autres, de ma soeur. Mais en une après-midi, son statut a beaucoup changé.
Une petite après-midi pluvieuse, une de ces après-midi où on est comme Astérix, où on pense que le ciel va nous tomber sur la tête tellement les nuages ont l'air lourds, il a sonné. Ma soeur n'était pas là. Au début, il n'a pas voulu entrer. "j'attendrais dans ma voiture", voilà ce qu'il m'avait dit. Mais, je l'avais traîné de force dans la cuisine. Et ici, je lui avais fait boire ce fameux jus de framboise, celui qui rend fou votre palet. On était resté là, tous les deux, à écouter Eels, à parler, à boire.
On était bien, hein?
Et puis, presque une heure après, ma soeur était arrivée. Je les avais laissés, le coeur gros. Elle allait parler avec ce Raphaël, celui qui m'avait appartenu pendant près de 60 minutes.

Puis quelques jours étaient passés. Parfois, quand je pensais à lui, je barrais mon visage d'un sourire béat. A lui. A Raphaël.

Et il y a eu ce texto. En plein cours de français. Mon portable avait sonné, discrètement. Tout le monde avait entendu, j'avais virrée au rouge violacée comme mon fameux jus. Tout le monde sauf la professeur. J'avais attendu l'intercours pour le lire.
" Salut Inès, c'est Raphaël. J'ai eu ton numéro, en cherchant sur le portable de ta soeur. Ne lui dis surtout pas. Enfait...voilà, j'aimerai qu'on se revoit. Renvoie-moi un message, si tu en as envie. Je t'embrasse. Raphaël."

J'hésitait. Il avait six ans de plus que moi. Mais l'envie de le revoir fut trop forte, et un mercredi de mi-octobre, on s'est revu. Sous le pseudo-marronier, place de la République.
Comme la première fois, on a bavardé. On se donnait rendez-vous tous les mercredis après-midi. Puis il y a eu cet autre texto:
" On peut se voir Vendredi? Bisous Raph "
Cette fois, je n'ai pas hésité une seule seconde et je les rejoins. Toujours et encore sous cet arbre. Notre arbre.
Je me suis assise à côté de lui. Nous n'avons pas parlé. On a profité de l'ambiance. Des feuilles si oranges qu'elles en paraissaient fluos tournoyaient autour de nous. Le tam-tam obsédant d'un jembe faisait de la concurence aux battements de mon coeur. L'air était un brin sucré, peut-être du aux fleurs qui nous environnaient.
Il m'a pris la main. Une goutte de pluie a coulé dans ma nuque. Il m'a carressé le visage, a passé sa main dans mes boucles brunes. Pas de " je t'aime". Pas de baisers. Rien que cette complicité amoureuse.

Pendant ces deux mois, il ne m'a jamais embrassé.

Et puis à un de nos randez-vous hebdomadaire, sa mine était pâle, son regard sombre, ses épaules voutées.
Je me souviens m'être dit "oh non".
Je me souviens qu'il m'a dit, tout en pleurant, " Si quelqu'un l'apprenait, ça nous ferait encore plus souffrir".
Je me souviens l'avoir traîté de lâche. Il n'était pas lâche. Il était conscient de cet amour "impossible". Il était si raisonnable. Pas moi.

Depuis je n'ai plus de nouvelles de lui. Ma soeur n'a jamais été au courant de notre relation.
Mais à la fin de l'année, elle m'a dit:
" Raphaël a eu son année de fac, il m'a demandé comment tu allais. Et tu sais quoi! Géraldine, sa petite copine est enceinte de deux mois!"

J'ai pleuré tout en souriant.
La vie s'est comme ça, plein de rebondissements.