Tu te souviens comme on jouait dans l'herbe un peu sale tout près du fleuve verdâtre. Tu ne t'es jamais sali... mais tu aurais tellement voulu.

Ca sentait bon les ordures mais nous on s'en fichait. Les voitures de temps en temps claxonnaient notre ballon rouge qui manquait parfois de rouler sous leurs roues.
Rouler sous des roues. Je trouve cela jolie.

Tu détestais le mot ''roue''.



Je ne sais pas si c'est la mélodie du piano qui me fait plonger dans l'océan magique de mes souvenirs.
Mais que dis-je... Pourquoi parler d'océan quand il s'agit de toi ? Peut-être parce que tu aimais tellement l'eau que tu ne la craignais plus.
Sur ce coups là, tu as été très idiot. Une des rares fois sans doute mais elle a causé ta perte.
Je me souviendrai toujours des joues de ta mère constellées de petites rayures rouges. Pourtant elle ne pleurait plus. Les larmes avaient seulement creusées des sillons dans sa peau douce.
J'admire beaucoup ta maman. Sa douceur et sa force. Tu lui ressemblais beaucoup. Le même caractère, les sautes d'humeur en plus, et les mêmes yeux verts. C'est peut-être pour cela que j'aime autant les yeux verts maintenant.

Tu sais, je pense à toi tous les jours. Un peu moins qu'avant parce que c'était trop.
Et pendant ces deux nuits d'insomnie, j'ai beaucoup prononcé ton prénom. J'avais envie d'être près de toi, d'attrapper des coups de soleil plus rouge que notre ballon, encore et toujours avec toi.
Le ballon. Tantôt tu l'adorais, tantôt tu le détestais. Toi et ton caractère orageusement doux.
Mas il est vrai que tu ne pouvais pas courir après lui. Alors tu jouais avec tes mains. Les miennes se souvienent de tes gestes lents, très adroits.
Tu jouais divinement bien de la guitare. Je l'enviais, cette vénarde, d'être pratiquement tout le temps avec toi.
Et là je pleure en écrivant. Toute seule mais pas complétement car je sens ta présence.
Parfois j'entends les roues de ton fauteuil roulant glisser près de moi et je souris bêtement. Quand j'étais déprimée, c'était ce bruit qui faisait que je me sentais moins seule.
Bientôt cinq ans...
Le temps passe décidément très vite. Trop.

Je t'aime. Tu me manques énormément, tu manques à tous ceux qui t'ont connus.