©Ninoutita


Effectivement, l'année scolaire recommence. Mes deux premiers réveils alors que la nuit dormait encore ont été un tant soit peu difficiles ou même, à la limite de l'impossible. Vraiment, sous la douche, j'entendais mon lit me criait de revenir dans ses bras comme s'il avait été un amoureux frustré de me voir partir. Enfin j'imagine que les amoureux peuvent s'enflammer comme cela. Ou alors je n'y suis pas du tout et ce ne sera pas la première fois.
Premiers cours de philo assez rassurants, j'ai même l'impression que ça devrait beaucoup me plaire. J'étais étrangement calme aujourd'hui, on me parle de devoirs, de bac, d'études futures et je bavarde sans répondre vraiment, j'enfouis mon angoisse de perfection quelque part et j'évite précautieusement de me pencher sur le puits dans lequel flottent tous mes doutes quant à l'avenir.

Ceux qui vivent loin me manquent, que ce soit à Paris, en Lorraine ou en Allemagne, j'ai envie de les voir. D'autres, ceux qui feraient mieux de s'absenter, se permettent de me donner de leurs nouvelles, je ferais mieux de parler au singulier et puis si c'est comme ça la guerre est déclarée, le foutage de gueule peut continuer et que le plus méchant gagne. June, tu es tombé sur la tête il y a maintenant plus d'un an, tu ne veux pas donner un avis précis sur notre relation ou simplement couper les ponts, est-ce que c'est moi qui doit en avoir la force ? Je n'y arriverai sûrement pas, il y a tes yeux menthalo et ton parfum que je n'aime pas qui me retiennent. Ce parfum tu ne le portais pas avant ou mon odorat s'efforçait à me mentir puisque cette fragrance un peu acide me rappelait un adulte trop présent dans ma vie, que j'ai haï toute mon enfance ou plutôt à partir d'une certaine carte postale déplacée. Ce n'était qu'une blague mais du haut de mes six ans, déchiffrant avec peine les mots écrits au dos, je rougissais de honte. En fait, plus j'y pense et plus je comprends qu'elle n'avait rien de déplacé seulement l'humour était trop évolué par rapport à l'âge que j'avais.
Enfin toujours est-il que lorsqu'il y a eu cette fissure, plus rien n'a pu la réparer et petit à petit, cet adulte est devenu très différent (ou devrais-je dire indifférent ?) avec moi. Presque gêné par ma présence, il jalousait bizarrement l'attention que me portaient mes parents. La seule chose dont il me parlait, lorsqu'il faisait l'effort de m'adresser deux mots, était en rapport direct avec les cours. Et il s'avère que parler de cours ne m'intéresse pas, j'y passe déjà les trois quart de ma vie.
Drôle de jour pour parler de lui, c'est sûrement parce que je l'ai croisé par hasard avant-hier. Depuis que j'ai grandi, il est un peu plus aimable. Mais j'ai du mal. J'ai une rancoeur enfantine.

Enfantine comme la lueur des yeux de Kiss. Me le rappeler est quelque chose de rassurant, contrairement à June ou surtout Romain, il est éclatant de réalité.