Dans mes yeux, juste le bout brunâtre des feuilles qui viennent piquer le ciel azuré. Le soleil éclate et rend les feuilles verdoyantes de santé.
On dirait que l'été a pris des vacances pour laisser place au début de l'automne. C'est beau de voir ça assise sur un banc avec pour seule compagnie ma Rita.




Tout à l'heure, entendre ses basquettes vertes pommes glissées sur le sol caoutchouteux du tram. Son rire comique qui fait exploser les vitres et qui rend l'ambiance joyeuse.
" Niniiiiii !!!! "
Un cri hystérique sonne jusqu'à mes oreilles.
" Ririiiiiii !!!! "
Je lui fonce dedans, manquant de lui enfoncer les lunettes dans le nez. Un méli-mélo de paroles sans queues ni têtes sort de nos bouches toutes deux béates. Béates de se revoir, dans un tram dégeulasse.
Elle me parait iréelle, comme une fée multicolore dans un tram maussade.
Ses cheveux blonds sont coiffés n'importe comment, comme d'habitude.
Sa chemise rayée rose bonbon est mal boutonnée.
Il n'y a qu'un mot pour définir ma Rita : originalité...jusqu'au bout des ses boucles d'oreilles étoilées.

" tu t'souviens du vieux parc, près d'chez moua ? "

Si j'm'en souviens...
Ce vieux parc... son banc miteux, son ciel orageux, ses feuilles dorées.


Et deux petites filles qui jouent aux elfes dans le tas de feuilles rouquin. Ce tas qui était plein de trésors...de cacas de chiens aussi. Des cacas surment magiques. Aussi magique que l'ambiance qui règnait dans ce parc et dans le coeur de ces deux petites filles.

Ses yeux indigos pétillent... " tu veux qu'on y retourne, en souvenir du bon vieux temps ? "
Mon coeur fait des bonds incroyables.

Le petit parc n'a pas changé. La même fabuleuse ambiance y règne.
" hé, Rita, t'a r'marqué, avant on arrivait même pas à toucher par terre avec nos pattes"
Mais maintenant tout est différent. Ou alors peut-être pas.
Le temps avance, nous aussi, mais parfois, il nous ratrappe et nous tombons, comme lors de nos premiers pas.

Faudrait pas qu'on oublie tous ces souvenirs.
Faudrait pas oublier les cacas magiques.
Faudrait tout simplement pas grandir trop vite.

Elle sort son labello à la fraise, s'en frotte un petit peu sur les lèvres.
Les minutes s'écoulent lentement presque comme le jus de framboise dans ma gorge.
Et notre retrouvaille surprise prend un air de fête.
On se quitte avec qu'une idée en tête, se retrouver encore une fois, mais pas n'importe où, non.
" Dans cet endroit ça serait bien ".