Moving, watching, working, sleeping, driving, walking, talking, smiling
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" Touuuurne à gaaauche ! Je vois le parking ! On y est !"
Nous arrivons sur un immense parking, Aracade fire au volume maximum pour nous mettre dans l'ambiance. Quelques fines gouttes de pluie s'écrasent sur le parbrise et je chante Noooo Caaars Gooo en hurlant. Ma soeur aurait presque envie de battre le rythme à grand coupe de klaxons. Klaxons ? Mais on va les voir !
Mon coeur ne bat pas, il saute de joie. Et ce n'est que le début.
Après avoir trouvé une place, je plonge dans le coffre à la recherche de la tente qu'on a prévu de planter pas loin d'amis à ma soeur. Ils sont à l'autre bout du camping, tant pis, on est en forme pour les rejoindre, même si c'est loin.
Alors on marche, on se fond dans l'atmosphère festivalière avec les minuscules cabines en plastique qui font office de toilettes puants, la boue ocre, les milliers de festivaliers à piercing, sans piercing, gothiques, sales, tous coups d'soleillés, bouteille de bière en main. Puis, on arrive à la porte du camping, on montre nos places et une fille dont les dents pourraient se compter sur les doigts d'une main nous enfile un bracelet jaune canari avec marqué Camping, Eurockéennes de Belfort 07. On passe les portes, marchons, marchons, marchons, manquons de nous faire renverser par un groupe de trois garçons bras-dessus-bras-dessous à cloche-pied et arrivons au poteau numéro 15, là où se trouvent nos amis.
Grandes embrassades de loin parce qu'on "s'est pas lavé depuis un jour, je puuuuueee".
"Asseyez-vous ! Vous voulez un peu d'campari"
Je n'ai qu'une chose à dire : oui !
Je parle quelques minutes avec Po, qui m'annonce que ce sera la onzième fois qu'elle voit Damon Albarn. Je manque de baver d'admiration et lui demande si elle lui a déjà parlé. Elle me répond que non. J'en déduis qu'elle n'est pas aussi folle de lui que moi.
"Booon c'est pas qu'il est déjà 15h maaais faudrait peut-être commencer à planter !
Des rires. Du gros n'importe quoi.
Lui qui fait la ladybird avec la house de ma Quechua sur le dos. Moi qui fait des blagues pourries "Qui a les sardines ? Et pour les planter, il faut un thon ?".
Quelques longues minutes après, la tente est en place.
Maintenant, il faut faire l'aller-retour puis se rendre jusqu'à la navette qui nous amènera jusqu'au site.
A l'entrée du site je croise Canet à barbe qui me dit qu'il est là depuis vendredi et que ses pieds commencent à partir en vrille. Je ris. Le spectacle de théâtre me semble loin, à lui aussi.
"Tu recommences l'an prochain ?"
" J'en sais trop rien...
On passe devant l'entrée des artistes et mon coeur bat très vite. Il est à quelques mètres, entrain de se préparer. J'aimerai bien savoir s'il a des rituels spéciales... une manière de ne pas trop stresser. J'en arrive à me l'imaginer entrain de pianoter une mélodie au hazard sur le dos de la basse de Paul Simonon. Un peu comme Romain sur les murs du Sud. Mais je m'égare.
Des gens en t-shirt rose bonbon Eurockéennes Belfort 07 nous refile plein de paperasses composées de diverses flyers pour les autres festivals tels que Rock en Seine ou la Route du Rock ou des autocollants fluos Klaxons ou encore des espèces de sticks qui font de la lumière. J'en reçois un jaune que j'allumerai une fois la nuit tombée.
Je remarque que le ciel s'éclaircit pendant qu'un mec de la sécurité fouille mon sac-à-dos. Et puis, j'y suis, enfin.
Je découvre peu à peu avec joie les différentes scènes, courant partout, lançant des ça va en réponse aux bonjours, je me sens libre, à l'aise, avec toute cette musique qui passe par une oreille pour laisser place à une autre qui bientôt se superposera à un son inconnu, agréable, à un cri strident, de gaité, d'ivresse.
Je ne sais pas où donner des yeux entre les grands écrans de chaque côté de la scène du chapiteau où jouent à ce moment là le groupe très frenchy Bikin machine.
Finalement je décide de me glisser au milieu de la foule avec monsieur Ladybird qui me propose un peu de sa kronembourg. Je la sirote doucement, m'en renverse un peu sur mon débardeur rayé rose et rouge et blanc (qui a dit que le rouge et le rose n'allaient pas ensemble ? pas moi en tout cas) et remue le bassin en rythme ou à peu près, sautillante, souriante, bien. J'ai l'impression d'être dans mon élément.
Il est bientôt 17h quand nous décidons de tous nous rendre à la plage où doivent jouer un petit groupe suèdois. Enfin pas si petit vu qu'ils jouent tout de même aux eurockéennes.
Je m'assieds un peu dans le sable jonché de mégots, bouteilles en plastique et même, d'os ? Je profite d'avoir à mes côtés une soeur souriante qui a tellement grandi en un an. Il y a de la sagesse dans mes pensées et à cette idée, je me gondole en solo, sur un air de synthé souidiche.
Je me relève enfin, bouge un peu ma tête, tappant du pied, le sourire décidément collé aux lèvres.
La pluie commence à retomber lorsqu'un petit soleil timide perce les nuages.
Je pense très fort à l'arc-en-ciel qui va se créer jusqu'à ce qu'il arrive. C'est l'paradis. La sable dégeulasse, la musique en live, l'eau d'un lac pas loin et les boules à facettes où se reflètent les couleurs des gens dansant, chantant, heureux.
17h20 sur mon portable, ma soeur envoie un texto à un ami à elle que je trouve très charmant. Malheureusement de dix ans mon aîné.
On le retrouve au chapiteau où je dansais comme une folle vingt minutes avant avec Mister LadyBird.
June est là, adossé à un des énormes poteaux, très élancé, un verre de bière en main.
Il nous fait la bise, "vous vous êtes déjà vus ?", demande ma soeur, nous hochons tous deux la tête, le sourire aux lèvres. Encore.
Ma soeur se tourne pour parler avec un ami et je commence à lui demander pour quel groupe en particulier il est venu. "The Good, the Bad and the Queen".
Ca tombe bien, moi aussi. Nous parlons pendant trente minutes, de lui et son groupe, de Damon Albarn, de Blur, des eurockéennes, de mes très vieilles doc'marteens. Puis Tv On The Radio débute et je pars me chercher un canéo fruits rouge.
Je reviens, les lèvres très rouges dûes à la saveur de mon soda et il me sourit, et je ne sais pas pourquoi, et je reste scotchée là, à quelques mètres de lui, le canéo en main, le porte feuille coincé entre mes dents, l'autre main entrain de remettre une barette étoile dans mes cheveux, le sac-à-dos à moitié ouvert, et son sourire dans mes yeux. C'est à ni plus rien comprendre. Ca me fait l'effet d'un coups, pas de foudre non, un coups d'bonheur de plus. Cette journée est terrible.
Terrible terrible.
Je finis par réaliser que je suis mal fagotée là, avec toutes mes mains occupée, "toutes" haha, comme si j'en avais plus que trois. Heu...
Il me dit doucement qu'il faudrait pas tarder pour aller voir the good, the bad and the queen à la grande scène pour qu'on soit tout devant. Il allume une cigarette et je suis surprise par la douceur de sa voix parce qu'en général aux concerts, on crie dans l'oreille de l'autre pour se faire comprendre et il est parfaitement compréhensible sans hurlements. Mince.
Ma soeur rit toujours avec le même ami, June finit sa clope et nous nous mettons en route vers la grande scène. On remonte la pente à vive allure et je lance que j'entends le coeur de Damon battre à mesure que nous avançons. Le pire c'est que c'est vrai. A moins que ce soit le mien ?
Il est 18h15, le concert commence dans trente-cinq minutes. Reste plus qu'à patienter. La scène est énorme. Je me place stratégiquement vers la gauche, là où se tient le piano en bois, le même que sur la photographie dans mon article précédent. J'ai un noeud à l'intérieur du ventre et le coeur qui saute de plus en plus haut à mesure que les minutes avancent. La foule devient de plus en plus dense. Ca parle, ça rie, ça tousse, ça chuchote, ça se mouche, ça baille. Je reste silencieuse. Je me retourne, June a la même expression concentrée que moi. Il me sourit avec les yeux et je le lui rends.
On sait.
Je vais voir Damon Albarn en chair et en os dans cinq minutes, quatre...trois............deux..........une. Quelques secondes. Quatre violonistes arrivent, s'installent.
Et enfin. Ils s'avancent, Paul Simonon prend sa basse et Lui. LUI ! Mon coeur enchaine les triple-salto, les sauts périlleux les plus complexes, il commence même à danser. Il est là, à deux, trois mètres de moi.
Je crie Damon ! Damon ! alors que la foule est silencieuse. Je suis pire qu'une groopie. Je suis Folle.
Ils commencent par la première chanson de l'album et feront celui-ci dans l'ordre. Ils sont assez mous. Il parait qu'ils sont décevants. Pas lui. Il est tel que je l'imaginais.
Et je sais, je suis persuadée qu'il m'a regardée. Il n'y a pas de doute, lorsqu'il faisait l'oiseau avec ses mains, j'ai été la seule à faire la même chose, les mains dans le ciel. J'exagère peut-être ? Non, non et renon.
Il m'a vue, moi et mes yeux trop grands pour mon visage.
Et tant pis s'il m'a déjà oubliée, je vis dans le souvenir alors qu'importe ?
Il regardait souvent les cieux, ces yeux limpides levés comme en attente de quelquechose. Et son petit sourire, sa voix nonchalante... tout.
Peut-être que le jour où il me décervra, j'aurais grandi. Pour l'instant je reste dans une admiration purement béate.
À 20h, il(s) s'en va(ont). Je crie encore son prénom. Puis dans ma tête.
June me saisit le bras et ne me demande rien. Il sait que ça m'a plue. Damon Albarn pourrait faire un duo avec Shy'M que ça me plairait encore et toujours.
N'importe quoi, n'est-ce pas ?
Je retrouve ma soeur au concert des Klaxons. On se déchaine ensemble et à la fin du concert, en attendant Air, je vais rapidement jetter un coups d'oeil à Tryo qui jouent sur la grande scène. Je sais encore toutes les paroles par coeur et lorsque je regarde un peu autour de moi, je remarque que tout le monde chante. Je pense que la réussite de Tryo est surtout visible à cela.
Ma soeur me rejoint, une assiette pleine de riz aux légumes en main, "c'est la seule chose pas trop dégeu que j'ai pu trouvé". On mange ensemble, piquant à l'autre la carotte piquée au bout d'la fourchette, s'empêchant de rire pour ne pas trop mitrailler l'autre de grains de riz semi-mâchés. On est con et on s'en contre-fout.
Bientôt nous nous glissons sous le chapiteau avec Po et une amie à elle, pour écouter Air. Ils entrent sur scène à la nuit tombée, tous deux vêtus de blancs. Comme deuxième chanson, ils entonnent Cherry Blossom Girl et je me souviens du nouvel an 2006 et des garçons emplis d'îvresse champagnesque me chantant cette chanson-là. Je pense à ma robe rouge à froufrous qui n'est plus à la bonne taille. Je pense à mon corps qui a beaucoup changé en une année et demi, à mon évolution. Je pense aussi que j'ai sûrement l'air con avec mon stick jaune lumineux en bouche. Et puis je sors de ma délicieuse torpeur par un "Vous êtes très sexy" d'un des chanteurs. Je suis somnambule. Je suis dans une bulle de mélodie électronique. Je suis bien. Je vais à merveille, vraiment. J'aperçois June qui me fait un sourire complice à travers la foule. Ma soeur a fermé les yeux, elle remue doucement la tête et une lumière bleuté se reflète sur le toit du chapiteau. Il fait frais, il fait bon.
Holy girl
Don't get up
For running
Stay with me
I feel sad
When you run
Sands of time
Are lying
On my chest
Stay in bed
I feel sad
When you run
Stay like this
On the hills
Of my chest
Don't wake up
I feel strange
When you go
Stop the night
Hold me tight
Holy girl
Don't stand up
I feel strange
When you go
Non, je ne me réveillerai pas.
Non.
Go.
Le concert de Air se termine sous un tonnerre d'applaudissements.
Ma soeur, June, Po, Mister LadyBird et d'autres courront vers la grande scène pour voir le dernier concert de la journée, celui d'Arcade Fire.
Il commence et nous voyons d'abord une grosse dame sur un écran en noir et blanc parler en s'essouflant. Et puis... ils sont là. Dix. C'est beaucoup.
Ils enchainent chansons géniales sur chansons géniales mais une petite mélancolie m'emplit déjà le coeur. C'est presque la fin.
Et ça finit comme ç'a commencé, sur No Cars Go.
Je souris.
Une nuit agitée au camping m'attend.
Très agitée.
Avec des jets de stick lumineux. On se les lance de tentes en tentes.
On chante. On hurle un peu. On danse.
Et finalement on s'endort lorsque le soleil se lève.
Le retour en train est difficile. J'ai envie de rester sur ce camping puant encore et encore.
Jusqu'à ce que je me sois évaporée. Où ?
Nous arrivons sur un immense parking, Aracade fire au volume maximum pour nous mettre dans l'ambiance. Quelques fines gouttes de pluie s'écrasent sur le parbrise et je chante Noooo Caaars Gooo en hurlant. Ma soeur aurait presque envie de battre le rythme à grand coupe de klaxons. Klaxons ? Mais on va les voir !
Mon coeur ne bat pas, il saute de joie. Et ce n'est que le début.
Après avoir trouvé une place, je plonge dans le coffre à la recherche de la tente qu'on a prévu de planter pas loin d'amis à ma soeur. Ils sont à l'autre bout du camping, tant pis, on est en forme pour les rejoindre, même si c'est loin.
Alors on marche, on se fond dans l'atmosphère festivalière avec les minuscules cabines en plastique qui font office de toilettes puants, la boue ocre, les milliers de festivaliers à piercing, sans piercing, gothiques, sales, tous coups d'soleillés, bouteille de bière en main. Puis, on arrive à la porte du camping, on montre nos places et une fille dont les dents pourraient se compter sur les doigts d'une main nous enfile un bracelet jaune canari avec marqué Camping, Eurockéennes de Belfort 07. On passe les portes, marchons, marchons, marchons, manquons de nous faire renverser par un groupe de trois garçons bras-dessus-bras-dessous à cloche-pied et arrivons au poteau numéro 15, là où se trouvent nos amis.
Grandes embrassades de loin parce qu'on "s'est pas lavé depuis un jour, je puuuuueee".
"Asseyez-vous ! Vous voulez un peu d'campari"
Je n'ai qu'une chose à dire : oui !
Je parle quelques minutes avec Po, qui m'annonce que ce sera la onzième fois qu'elle voit Damon Albarn. Je manque de baver d'admiration et lui demande si elle lui a déjà parlé. Elle me répond que non. J'en déduis qu'elle n'est pas aussi folle de lui que moi.
"Booon c'est pas qu'il est déjà 15h maaais faudrait peut-être commencer à planter !
Des rires. Du gros n'importe quoi.
Lui qui fait la ladybird avec la house de ma Quechua sur le dos. Moi qui fait des blagues pourries "Qui a les sardines ? Et pour les planter, il faut un thon ?".
Quelques longues minutes après, la tente est en place.
Maintenant, il faut faire l'aller-retour puis se rendre jusqu'à la navette qui nous amènera jusqu'au site.
A l'entrée du site je croise Canet à barbe qui me dit qu'il est là depuis vendredi et que ses pieds commencent à partir en vrille. Je ris. Le spectacle de théâtre me semble loin, à lui aussi.
"Tu recommences l'an prochain ?"
" J'en sais trop rien...
On passe devant l'entrée des artistes et mon coeur bat très vite. Il est à quelques mètres, entrain de se préparer. J'aimerai bien savoir s'il a des rituels spéciales... une manière de ne pas trop stresser. J'en arrive à me l'imaginer entrain de pianoter une mélodie au hazard sur le dos de la basse de Paul Simonon. Un peu comme Romain sur les murs du Sud. Mais je m'égare.
Des gens en t-shirt rose bonbon Eurockéennes Belfort 07 nous refile plein de paperasses composées de diverses flyers pour les autres festivals tels que Rock en Seine ou la Route du Rock ou des autocollants fluos Klaxons ou encore des espèces de sticks qui font de la lumière. J'en reçois un jaune que j'allumerai une fois la nuit tombée.
Je remarque que le ciel s'éclaircit pendant qu'un mec de la sécurité fouille mon sac-à-dos. Et puis, j'y suis, enfin.
Je découvre peu à peu avec joie les différentes scènes, courant partout, lançant des ça va en réponse aux bonjours, je me sens libre, à l'aise, avec toute cette musique qui passe par une oreille pour laisser place à une autre qui bientôt se superposera à un son inconnu, agréable, à un cri strident, de gaité, d'ivresse.
Je ne sais pas où donner des yeux entre les grands écrans de chaque côté de la scène du chapiteau où jouent à ce moment là le groupe très frenchy Bikin machine.
Finalement je décide de me glisser au milieu de la foule avec monsieur Ladybird qui me propose un peu de sa kronembourg. Je la sirote doucement, m'en renverse un peu sur mon débardeur rayé rose et rouge et blanc (qui a dit que le rouge et le rose n'allaient pas ensemble ? pas moi en tout cas) et remue le bassin en rythme ou à peu près, sautillante, souriante, bien. J'ai l'impression d'être dans mon élément.
Il est bientôt 17h quand nous décidons de tous nous rendre à la plage où doivent jouer un petit groupe suèdois. Enfin pas si petit vu qu'ils jouent tout de même aux eurockéennes.
Je m'assieds un peu dans le sable jonché de mégots, bouteilles en plastique et même, d'os ? Je profite d'avoir à mes côtés une soeur souriante qui a tellement grandi en un an. Il y a de la sagesse dans mes pensées et à cette idée, je me gondole en solo, sur un air de synthé souidiche.
Je me relève enfin, bouge un peu ma tête, tappant du pied, le sourire décidément collé aux lèvres.
La pluie commence à retomber lorsqu'un petit soleil timide perce les nuages.
Je pense très fort à l'arc-en-ciel qui va se créer jusqu'à ce qu'il arrive. C'est l'paradis. La sable dégeulasse, la musique en live, l'eau d'un lac pas loin et les boules à facettes où se reflètent les couleurs des gens dansant, chantant, heureux.
17h20 sur mon portable, ma soeur envoie un texto à un ami à elle que je trouve très charmant. Malheureusement de dix ans mon aîné.
On le retrouve au chapiteau où je dansais comme une folle vingt minutes avant avec Mister LadyBird.
June est là, adossé à un des énormes poteaux, très élancé, un verre de bière en main.
Il nous fait la bise, "vous vous êtes déjà vus ?", demande ma soeur, nous hochons tous deux la tête, le sourire aux lèvres. Encore.
Ma soeur se tourne pour parler avec un ami et je commence à lui demander pour quel groupe en particulier il est venu. "The Good, the Bad and the Queen".
Ca tombe bien, moi aussi. Nous parlons pendant trente minutes, de lui et son groupe, de Damon Albarn, de Blur, des eurockéennes, de mes très vieilles doc'marteens. Puis Tv On The Radio débute et je pars me chercher un canéo fruits rouge.
Je reviens, les lèvres très rouges dûes à la saveur de mon soda et il me sourit, et je ne sais pas pourquoi, et je reste scotchée là, à quelques mètres de lui, le canéo en main, le porte feuille coincé entre mes dents, l'autre main entrain de remettre une barette étoile dans mes cheveux, le sac-à-dos à moitié ouvert, et son sourire dans mes yeux. C'est à ni plus rien comprendre. Ca me fait l'effet d'un coups, pas de foudre non, un coups d'bonheur de plus. Cette journée est terrible.
Terrible terrible.
Je finis par réaliser que je suis mal fagotée là, avec toutes mes mains occupée, "toutes" haha, comme si j'en avais plus que trois. Heu...
Il me dit doucement qu'il faudrait pas tarder pour aller voir the good, the bad and the queen à la grande scène pour qu'on soit tout devant. Il allume une cigarette et je suis surprise par la douceur de sa voix parce qu'en général aux concerts, on crie dans l'oreille de l'autre pour se faire comprendre et il est parfaitement compréhensible sans hurlements. Mince.
Ma soeur rit toujours avec le même ami, June finit sa clope et nous nous mettons en route vers la grande scène. On remonte la pente à vive allure et je lance que j'entends le coeur de Damon battre à mesure que nous avançons. Le pire c'est que c'est vrai. A moins que ce soit le mien ?
Il est 18h15, le concert commence dans trente-cinq minutes. Reste plus qu'à patienter. La scène est énorme. Je me place stratégiquement vers la gauche, là où se tient le piano en bois, le même que sur la photographie dans mon article précédent. J'ai un noeud à l'intérieur du ventre et le coeur qui saute de plus en plus haut à mesure que les minutes avancent. La foule devient de plus en plus dense. Ca parle, ça rie, ça tousse, ça chuchote, ça se mouche, ça baille. Je reste silencieuse. Je me retourne, June a la même expression concentrée que moi. Il me sourit avec les yeux et je le lui rends.
On sait.
Je vais voir Damon Albarn en chair et en os dans cinq minutes, quatre...trois............deux..........une. Quelques secondes. Quatre violonistes arrivent, s'installent.
Et enfin. Ils s'avancent, Paul Simonon prend sa basse et Lui. LUI ! Mon coeur enchaine les triple-salto, les sauts périlleux les plus complexes, il commence même à danser. Il est là, à deux, trois mètres de moi.
Je crie Damon ! Damon ! alors que la foule est silencieuse. Je suis pire qu'une groopie. Je suis Folle.
Ils commencent par la première chanson de l'album et feront celui-ci dans l'ordre. Ils sont assez mous. Il parait qu'ils sont décevants. Pas lui. Il est tel que je l'imaginais.
Et je sais, je suis persuadée qu'il m'a regardée. Il n'y a pas de doute, lorsqu'il faisait l'oiseau avec ses mains, j'ai été la seule à faire la même chose, les mains dans le ciel. J'exagère peut-être ? Non, non et renon.
Il m'a vue, moi et mes yeux trop grands pour mon visage.
Et tant pis s'il m'a déjà oubliée, je vis dans le souvenir alors qu'importe ?
Il regardait souvent les cieux, ces yeux limpides levés comme en attente de quelquechose. Et son petit sourire, sa voix nonchalante... tout.
Peut-être que le jour où il me décervra, j'aurais grandi. Pour l'instant je reste dans une admiration purement béate.
À 20h, il(s) s'en va(ont). Je crie encore son prénom. Puis dans ma tête.
June me saisit le bras et ne me demande rien. Il sait que ça m'a plue. Damon Albarn pourrait faire un duo avec Shy'M que ça me plairait encore et toujours.
N'importe quoi, n'est-ce pas ?
Je retrouve ma soeur au concert des Klaxons. On se déchaine ensemble et à la fin du concert, en attendant Air, je vais rapidement jetter un coups d'oeil à Tryo qui jouent sur la grande scène. Je sais encore toutes les paroles par coeur et lorsque je regarde un peu autour de moi, je remarque que tout le monde chante. Je pense que la réussite de Tryo est surtout visible à cela.
Ma soeur me rejoint, une assiette pleine de riz aux légumes en main, "c'est la seule chose pas trop dégeu que j'ai pu trouvé". On mange ensemble, piquant à l'autre la carotte piquée au bout d'la fourchette, s'empêchant de rire pour ne pas trop mitrailler l'autre de grains de riz semi-mâchés. On est con et on s'en contre-fout.
Bientôt nous nous glissons sous le chapiteau avec Po et une amie à elle, pour écouter Air. Ils entrent sur scène à la nuit tombée, tous deux vêtus de blancs. Comme deuxième chanson, ils entonnent Cherry Blossom Girl et je me souviens du nouvel an 2006 et des garçons emplis d'îvresse champagnesque me chantant cette chanson-là. Je pense à ma robe rouge à froufrous qui n'est plus à la bonne taille. Je pense à mon corps qui a beaucoup changé en une année et demi, à mon évolution. Je pense aussi que j'ai sûrement l'air con avec mon stick jaune lumineux en bouche. Et puis je sors de ma délicieuse torpeur par un "Vous êtes très sexy" d'un des chanteurs. Je suis somnambule. Je suis dans une bulle de mélodie électronique. Je suis bien. Je vais à merveille, vraiment. J'aperçois June qui me fait un sourire complice à travers la foule. Ma soeur a fermé les yeux, elle remue doucement la tête et une lumière bleuté se reflète sur le toit du chapiteau. Il fait frais, il fait bon.
Holy girl
Don't get up
For running
Stay with me
I feel sad
When you run
Sands of time
Are lying
On my chest
Stay in bed
I feel sad
When you run
Stay like this
On the hills
Of my chest
Don't wake up
I feel strange
When you go
Stop the night
Hold me tight
Holy girl
Don't stand up
I feel strange
When you go
Non, je ne me réveillerai pas.
Non.
Go.
Le concert de Air se termine sous un tonnerre d'applaudissements.
Ma soeur, June, Po, Mister LadyBird et d'autres courront vers la grande scène pour voir le dernier concert de la journée, celui d'Arcade Fire.
Il commence et nous voyons d'abord une grosse dame sur un écran en noir et blanc parler en s'essouflant. Et puis... ils sont là. Dix. C'est beaucoup.
Ils enchainent chansons géniales sur chansons géniales mais une petite mélancolie m'emplit déjà le coeur. C'est presque la fin.
Et ça finit comme ç'a commencé, sur No Cars Go.
Je souris.
Une nuit agitée au camping m'attend.
Très agitée.
Avec des jets de stick lumineux. On se les lance de tentes en tentes.
On chante. On hurle un peu. On danse.
Et finalement on s'endort lorsque le soleil se lève.
Le retour en train est difficile. J'ai envie de rester sur ce camping puant encore et encore.
Jusqu'à ce que je me sois évaporée. Où ?
Ecrit par ninoutita, le Lundi 2 Juillet 2007, 18:39 dans la rubrique Journal qui se veut intime .
Commentaires :
inconsciente
Merci de décrire tout comme ça.
Ton regard. Ton sourire. La musique. J'ai l'impression de l'entendre.
j'ai l'impression d'être dans le même état que toi.
J'ai l'impression que moi aussi j'étais là-bas avec toi...
Quelle merveille.
je voulais aussi te dire que moi j'adore mais vraiment j'adore le rose et le rouge ensemble.
voilà !
je t'embrasse fort ma jolie ninou qui doit avoir des étoiles plein la tête.
:)