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La Muse à Mort
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© Ninoutita
Il faisait à peine jour lorsque mes yeux se sont ouverts. J'avais mal au coeur et au dos, je souffrais de maux physiques qui me paralysaient dans mon lit. Pourtant, tant bien que mal, je me suis levée. Ce fut un effort surhumain et déjà mes jambes vacillaient sous mon poids qui s'était incroyablement allégé depuis le début de ma maladie.
J'aimais l'appeller mon mal et finalement après l'avoir haïe pour tout ce qu'il me faisait subir ce foutu mal, je l'avais dompté et commencais même à l'apprécier. Après tout, sans lui, les gens n'auraient pas été à mes petits soins comme cela, les gens auraient continuer à m'éviter, à rire de mon corps difforme, à se moquer de mes manières maladroites. A l'époque, personne ne savait. Maintenant tout le monde est au courant et est tellement plein d'égards pour ma faible personne. Il faudrait qu'ils fassent attention à ne pas s'étouffer d'hypocrisie. Même si malgré moi, j'apprécie cette hypocrisie constante qui m'entoure. Je me sens dans une bulle pleine de bons sentiments, de masques souriants et de compliments sur mon bon teint.
Mon teint. Il restait en permanence rougeaud, comme après avoir pris un bon bain de mer à midi. Et pourtant, pourtant il n'était que le reflet de cette fièvre qui me prenait le crâne chaque seconde.
La seule personne qui se soit comportée de la même façon, ce fut ma mère. Elle continua à m'aimer et moi, à la détester.
Parfois j'ai l'impression qu'en la détestant ainsi, je vais finir par l'assassiner par derrière. J'ai tout essayé pour éprouver de la tendresse envers elle mais sa voix, ses manières, son caractère, sa personne toute entière reste coincée entravers de ma gorge brûlante.
Je lui reproche de m'avoir mise au monde car ce fut là ma mise à mort. Elle m'a refilée le gène du mal, un mal qu'elle n'a pas eu à subir. J'ai peur de crever avant elle. J'ai peur de me voir mourir tandis qu'elle vivra encore. J'ai également peur, tellement peur, de la vie. Même plus peur d'elle que de ma mort. J'ai peur que lorsque sonnera le glas, tout s'arrêtera et que ce soit le noir complet, et cela pour l'éternité. Il parait que l'éternité a de drôles d'idées parfois. Elle nous réincarne en coulis d'urine. Je ne veux pas être une misérable goutte de pisse. Je veux être ma voisine, avec ses beaux seins, sa voix chaude d'alto et ses sourcils transparents. Elle a tous les garçons, ces chiens, à ses pieds. Je veux revivre. Je veux sentir qu'on m'aime vraiment et pas juste parce que je fais pitié.
Je veux.
Il suffirait de remonter le temps. Que mon père trompe ma mère. Que je naisse du sein d'une magnifique mangeuse d'hommes. Et que je grandisse tant bien que mal entre ma beauté et l'amour que me donneront tous mes proches et même les inconnus. Mais, je suffoque. Non non non, je ne veux pas que mon dernier râle approche. Je veux, je....
Ecrit par ninoutita, le Dimanche 15 Avril 2007, 15:14 dans la rubrique Journal qui se veut intime .