J'ai passé 20 minutes de ma vie dans un tube pour faire une IRM. 20 minutes sans trop respirer, sans bouger du tout et sans se gratter. Mais j'ai beaucoup pensé dans ma grotte de plastique. Malgré les bruits sourds ou stridents qui me perçaient les tympans. Même les petites lumières vertes me semblaient insupportables.
Je ne suis pas allée en cours cette après-midi, trop fatiguée. J'en ai profité pour faire ma valise pour vendredi. Pour Caen. On est la seule classe a faire un petit voyage. Il faut qu'on en profite à fond car ce seront nos derniers instants de collégiens. Puis on sera tous engloutis par des horizons bien différents. Quelques uns se retrouveront mais beaucoup d'entre nous se perderont de vue.
Enfin, n'est-ce pas ce que j'ai voulu pendant toute cette année ?
Pourtant je profite du soleil filtré par les feuilles du grand marronier de la cour. On pensait pas qu'il re-feuillerait après que des hommes vêtus de bleu l'ait coupé. Mais maintenant il se dresse fièrement devant nous et il nous nargue en murmurant : "vous voyez les mecs, je serai toujours plus grand que vous".

Alex m'a téléphonée et j'ai toute suite senti qu'il n'était pas en forme. Peut-être à sa voix chiffonnée, son humour calculé. Encore sa copine, son crocodile à perruque rouge. Qui m'adore. Mais chuuuut, faut pas qu'je sache ! Parce que cela me fait encore plus culpabilisée. Mais elle avait pas qu'à sortir avec un garçon de quatre ans son cadet.
Et elle avait pas qu'à m'adorer.
Et je n'avais pas qu'à le rencontrer. Mais moi j'ai pas demandée à être réveillée tout l'été, vers trois heures du matin, par un garçon grand aux cheveux courts et bruns qui venait se glisser sous les draps à mes côtés.
J'ai vécu un été de légende. Quand j'y repense je n'ai pas l'impression que cela m’est réellement arrivée. Toutes ces nuits à parler, à sentir son souffle dans mon cou, à angoisser à l'idée que ma mère passe le pas de ma porte et nous voit.

Mais l'été est passé. Puis les autres saisons.

Et tout change.