Et bien, dire qu'on est le premier janvier 2006.

J'ai envie de vous raconter ma soirée et ma nuit du nouvel an, en détail. Alors soit, je raconte.

D'abord il y a eu la soirée avec la famille, le champagne qui fait pétiller les yeux, nos verres à pied qui s'entr'choquent, la musique de Kirikou en fond, ma robe rouge pleine de volant et le foie gras. Une bonne ambiance qui règne dans le salon chaleureux peint de soleil. Les canapés confortables et lumineux, la belle nappe rose fushia sur la table basse. Le charme à la mexiquaine. Qu'est-ce que je suis fière de mes origines.

Et puis minuit sonne, les bisous, ma soeur qui appelle son copain irlandais mais il n'est qu'onze heures chez lui. Tant piiiis. Moi qui envoie un message à ma meilleure amie, à celui que j'aime et à ses copains, mais pas aux miens parce que dans une heure je les rejoins à la fête d'Alex. Mais d'abord place aux feux d'artifices qui gisent là, en vrac, sur une chaise dans l'entrée. On s'empresse de les prendre en mains, les fumeuses ( mes deux soeurs ) prêtent des briquets aux non fumeurs ( mon frère, sa copine, mes parents et moi ). J'aurais bien sorti le mien de la poche de mon manteau mais j'avais pas envie que ma mère me soupçonne de fumer.
La rue est humide, la neige éphémère a déjà fondue.
On met les bouteilles de verres vides en rang d'ognion puis c'est parti, tout feu tout flamme, les mèches s'allument, et les feux s'envolent, laissant place à des regards émerveillés et à des petits cris joyeux.

Puis voilà qu'une heure arrive, je laisse ma famille et je pars chez mon cher voisin, Alex.

Pendant qu'haletante, je sonne, mon coeur se serre. Luc sera peut-être là. M'enfous. Je suis là pour m'éclater, pas pour succomber.
Alex m'ouvre, les yeux équarquillés.

" Bha quoi ? "
" t'es... t'es... t...t... en robe ! " ( non non c'est ma combinaison de ski )

Et sur ce il me plaque un gros bisous de bonne année sur la joue.
Et sur ce Luc apparaît derrière lui. D'un coups. Comme un Ange. Mais j'en aime un autre d'Ange. Un Ange du rock. Damned.

Quand nous entrons dans le salon, la fête bat plus vite que nos coeur tous réunis. Mais bon voilà, avec une robe rouge A volant, on se fait beaucoup remarquer. Malheureusement. Pourtant j'avais pas mis des talons de 10 centimètres de hauteur juste des converses.
Puis un mec déjà un peu bourré se lève brusquement du canapé bleu et se met à chantonner "Cherry Blossom Girl".
Et bien sûr je deviens plus rouge que ma robe. Alex vient à mon secours, un verre de téquila pour le souleur saoûlé.
Puis Luc sort son violon et je m'assieds dans un coin de la salle, les jambes en tailleur, pour regarder ses belles mains glisser avec habilité sur les cordes du petit corps de bois.
Il m'impressionne toujours autant. Une grande sagesse se dégage de lui. Comme si il avait tout vu, tout pleuré, tout souris. Mais son air n'est pas blasé pour autant.
Je le regarde. J'imagine que je suis ses mains, que je ressens chacune des vibration des cordes. Que je vibre avec elles. Comme une femme pour un amour impossible. Ou plus encore. Mais d'un coups je change de garçon et je me retrouve à la place des cordes de la guitare de celui que j'aime. Et je vois me glisser dessus ses mains fortes, musclées. Également belles.
Une voix aigue me tire de ma rêverie. Je me retourne et me retrouve nez à nez avec un garçon blond jusqu'aux cils.
" Il est beau hein " qu'il me dit.
J'hoche un peu la tête et je reviens à ma contemplation, accompagnée de mon nouvel acolyte.
Après qu'il ait cessé de jouer, je parle avec le garçon aux cils blonds qui en plus de cela a un beau regard azur.
Il m'annonce qu'il s'appelle Martin et qu'il a 17 ans.
Nous parlons de musique, de voyage et même de littérature. Puis nous en venons à l'amour.
" je suis homosexuel "
Il dit cela avec automatisme, comme si il s'était entraîné devant sa glace des centaines de fois. Je n'ose rien lui répondre pas parce que son choix me choque mais plutôt parce qu'il l'a dit d'une manière un peu trop artificielle.
Alors petit à petit j'installe un silence tout doux, qu'aucun de nous deux n'ose blesser. Puis Alex arrive, les pomettes rougies, l'haleine encombrée par l'alcool.
Les invités partent petit à petit, quelques un vomissent lamentablement derrière un arbre, pendant que d'autres titubent.
Moi je reste dormir chez Alex avec Luc, Sarah, Martin et Laurent . Nous jettons quelques matelas au milieu de la chambre d'Alex, je dors avec lui pendant que Sarah prend son lit, les trois autres s'éparpillent un peu n'importe comment, n'importe où.
Trois minutes après Sarah et Laurent ronflent déjà. Trois heures plus tard aucun des autres ne pionceaient.
Luc a encore joué du violon, Alex a pris son jembe et m'a pretée une guitare. Martin nous regardait, ou plutot, scrutait Luc. Un amour naissant se lisait dans son regard. C'était beau et triste à la fois, en sachant que Luc ne jure que par les femmes.
Puis nous avons reposé les instruments et parlé. Beaucoup. A n'en plus finir.

Aujourd'hui j'ai de grandes cernes noires sous les yeux.
Mais c'est tant pis, parce qu'une nuit comme celle-ci, ça ne se rate pas.